Les sociétés doivent-elles faire la différence entre PDG et DG ?

La France est l’un des rares pays à avoir les fonctions de président et directeur général conjointes : 23 des entreprises du CAC 40. De plus en plus, la fonction de PDG (vs Président + DG) fait du bruit. Quelle est la différence entre PDG et DG dans une société ? Une dissociation des pouvoirs serait-elle plus bénéfique à la gouvernance de l’entreprise ? Quels sont les avantages et inconvénients à un pouvoir partagé ?

Différence entre PDG et DG : Présentation des deux fonctions

Pour comprendre la différence entre PDG et DG, il faut décortiquer les rôles et missions du président et du directeur général. La fonction de président est peu détaillée dans les textes réglementaires, comme dans les codes de gouvernance. Il est bien évidemment en charge du bon fonctionnement de la gouvernance d’entreprise. Toutefois, ses autres missions doivent être précisées dans le règlement intérieur, comme celles du directeur général. Cette clarification des champs d’attribution permet un exercice plus sain du pouvoir sans concurrence, ni conflit.

Lorsque le président cumule sa fonction avec celle de directeur général, il est encore plus difficile d’en cerner les rôles respectifs. La frontière entre les deux est souvent complexe à visualiser. Néanmoins, il est possible de distinguer plusieurs types de différence entre PDG et DG.

Le président d’une société préside et anime son conseil d’administration. Il a donc un rôle au sein de l’organe contrôlant la direction et définissant la stratégie de l’entreprise. Il doit s’assurer que les administrateurs sont en mesure de remplir parfaitement leurs missions. De plus, il a la possibilité d’influer sur l’ordre du jour des séances du conseil et donc sur les sujets traités. Le président rend des comptes à l’assemblée générale des actionnaires dont il préside les réunions.

Néanmoins, c’est bien le conseil d’administration qui a le pouvoir de décision, et non le président. La fonction de président est prestigieuse, mais ne recèle que peu de pouvoirs. Il ne peut pas représenter la société, ni porter sa signature sur les documents officiels, à l’exception de ceux du CA. En réalité, le droit français confère le maximum de pouvoir d’administration des entreprises aux conseils, y compris celui de nommer et de révoquer le président et le directeur général.

L’action d’un président s’inscrit dans le long terme pour forger un consensus sur la vision de la société. Il va chercher à prendre en compte les intérêts de l’ensemble des parties prenantes de la société dans une optique de valorisation du groupe.

Le directeur général s’occupe de la gestion courante de l’entreprise au quotidien avec en ligne de mire les résultats comptables de l’entreprise. Il s’inscrit ainsi dans une logique de court terme en cherchant à faire valoir ses orientations stratégiques. C’est une importante différence entre PDG et DG. Il agit au nom de la société dans le cadre d’un pouvoir plus étendu que celui du président. Il assure plusieurs missions conjointement avec le conseil d’administration. Pour ce faire, il prépare les travaux et établit les propositions qui sont ensuite présentées au CA qui les contrôle et les valide.

Les avantages à fusionner les fonctions de DG et président

Bien que largement critiqué, le cumul du rôle de président et de celui de directeur général présente des bénéfices qu’il convient de décrire.

Tout d’abord, le président d’une société dispose d’une vue d’ensemble et d’une vision à long terme ainsi que d’une fine maîtrise des intérêts de toutes les parties prenantes, qui sont bénéfiques au directeur général. Du fait de la différence entre PDG et DG, la fusion des fonctions permet à l’un de bénéficier des spécificités de la fonction de l’autre. L’intégration de l’ADN et des valeurs profondes de la société dans la gestion courante de l’entreprise est d’autant plus aisée et fluide que les fonctions sont non-dissociées. Le président qui est aussi DG est davantage en prise directe avec les réalités opérationnelles de l’entreprise.

De plus, l’existence d’un PDG permet au conseil d’administration de bénéficier de présentation de l’exécutif durant ses réunions. Ainsi, les administrateurs peuvent s’enrichir de la fine maîtrise des sujets abordés, mieux comprendre les questions de gestion courante de l’entreprise et être directement au contact de la direction.

Il est souvent dit que la présence d’un PDG permet plus d’efficacité avec une meilleure incarnation de la société. Cette configuration est aussi à même de raccourcir les circuits décisionnels. Par ailleurs, certains défenseurs de cette double fonction argumentent qu’elle évite tout conflit entre ses deux personnalités de premier plan d’une entreprise.

Les challenges au cumul des fonctions de président et directeur général

Pour parfaitement comprendre les implications de la différence entre PDG et DG, il faut entendre le principe de séparation des pouvoirs ainsi que celui d’indépendance des instances de contrôle. En cas de cumul des fonctions, le directeur général se retrouve alors aux séances du conseil d’administration à présider les réunions et fixer les sujets qui sont abordés. Or, le conseil doit contrôler la direction en toute indépendance. Un PDG se retrouve alors juge et partie.

Un autre danger à la fusion des fonctions de président et de directeur général réside dans la confusion des rôles. D’un côté, le président doit faire en sorte que les administrateurs remplissent leur propre mission. De l’autre, le directeur général dispose de ses missions exécutives. Le CA n’a pas ce rôle exécutif. Or, la tentation de la confusion est forte avec un PDG.

Une autre difficulté à l’absence de différence entre PDG et DG concerne la problématique de l’abus de position dominante. À titre d’exemple, le président qui détermine l’ordre du jour des réunions du conseil d’administration peut l’orienter et le planifier en fonction des intérêts du directeur général. De plus, du fait de sa maîtrise de certains sujets compte tenu de sa contribution à son élaboration, il peut avoir un impact conséquent sur l’orientation des débats.

Enfin, il importe que chaque conseil d’administration, en tant que garant de l’équilibre des pouvoirs, se montre vigilant en cas de cumul des fonctions de président et DG. Cela représente un risque en matière de gouvernance d’entreprise et de conflit d’intérêt. Le CA ne peut alors bénéficier de toute l’indépendance nécessaire d’un arbitre neutre et objectif. Il doit avoir parfaitement conscience de cette difficulté inhérente à la fusion des deux fonctions.

Le rôle du conseil d’administration est essentiel dans les entreprises où la différence entre PDG et DG n’est pas établie. Il doit pouvoir prendre l’initiative, comme convoquer une séance en définissant son ordre du jour, s’il n’y en a pas eu depuis plus de deux mois. Au sein du CA, les administrateurs indépendants, l’administrateur référent, les comités spécialisés et leurs présidents respectifs sont des acteurs de premier plan de cette impérative vigilance. Le conseil doit pouvoir rappeler son président à sa mission et ne pas le laisser librement gérer les choses comme il l’entend. L’unité des fonctions n’est possible qu’avec un conseil d’administration fort.

Faire la différence entre PDG et DG est de plus en plus commun au sein des sociétés françaises, jusque-là habituées à la fusion des fonctions de directeur général et président. L’une et l’autre des configurations présentent des avantages et des contraintes, même si l’unicité semble bien plus sujette à critique que la dissociation.