Gouvernance
Le censeur dans les conseils d’administration : rôle et responsabilité
Au sein des multinationales, le censeur est un poste discret qui existe traditionnellement. En charge du respect de la stricte application des statuts, il participe de façon consultative au conseil d’administration ou de surveillance. Parfois incomprise ou contestée, sa présence semble en voie de développement dans les entreprises françaises. Quels est son rôle et l’encadrement prévu ? Quel est son profil-type et sa représentation dans les sociétés françaises ?
À quoi sert le censeur dans un conseil d’administration ?
Les grandes sociétés qui le souhaitent peuvent nommer un ou plusieurs censeurs au sein de leur conseil de surveillance ou conseil d’administration. Il s’agit d’une fonction existant traditionnellement dans les entreprises, héritée des « censors » de l’Empire romain. Leur présence dans les sociétés cotées se développe en réponse aux enjeux juridiques, de la gouvernance d’entreprise et aux dérives en matière de rémunération des dirigeants.
Il revient à chaque société d’en préciser le nombre, les missions, la rémunération et les conditions de nomination. Le censeur peut être une personne physique ou morale. Il est nommé soit par le conseil, soit par l’assemblée générale des actionnaires pour un mandat d’une durée préalablement déterminée d’un an ou davantage.
Il assure plusieurs rôles au sein du conseil selon ce que chaque société décide. Il a pour mission de garantir la bonne application des statuts de la société, du règlement intérieur du conseil et, d’une façon générale, des règles de fonctionnement. Dans l’optique de soutenir la bonne gouvernance d’entreprise, il observe le juste respect des décisions prises. Il peut être amené à analyser et vérifier les inventaires et les comptes annuels de l’organisme.
Les censeurs ont un rôle de conseil. Ils sont chargés de prendre du recul et de partager des analyses offrant une certaine distance. Ils ont la possibilité, selon les cas, d’intervenir en assemblée générale et/ou lors des séances du conseil d’administration. Ils y exposent alors leurs observations. Ils n’ont pas de pouvoir de décision, mais peuvent disposer d’une voix consultative.
Quel est l’encadrement prévu pour le censeur en France ?
En France, il n’existe pas de cadre réglementaire décrivant la fonction de censeur. Bien que considéré comme le code de référence des sociétés françaises, le Code sur le gouvernement d’entreprise des sociétés cotées, publié conjointement par l’AFEP (Association française des entreprises privées) et le MEDEF (Mouvement des entreprises de France), ne mentionne à aucun instant ce poste.
L’AMF (Autorité des marchés financiers) a étayé une analyse de ce poste dans son Rapport 2019 sur le gouvernement d’entreprise et la rémunération des dirigeants des sociétés cotées en mettant en exergue diverses recommandations pour les sociétés. Ainsi, elle préconise, avant le recrutement d’un censeur, de se questionner sur cette opportunité. De plus, elle met en garde les entreprises y souscrivant concernant la maîtrise du cadre réglementaire concerné, en particulier les abus de marché. Les sociétés qui souhaitent y avoir recours sont invitées à définir clairement le mode de désignation ainsi que les missions dévolues.
En outre, l’AMF recommande aux sociétés une certaine prudence par rapport aux censeurs. En effet, ils ne sont pas nécessairement soumis aux mêmes règles que les administrateurs. Il est nécessaire que chaque organisme établisse un règlement d’encadrement pour le censeur déterminant des obligations et contraintes pour les censeurs incluant, notamment, la confidentialité ou encore l’abstention en cas de conflit d’intérêts.
En matière de rémunération, il convient de se référer au texte du bulletin mensuel de mars 1978 de la Commission des opérations de bourse. Dans la mesure où le censeur ne représente pas les organes légaux de la société, celle-ci ne peut le rémunérer directement, à moins que des missions concrètes ne lui soient rendues avec les justificatifs adéquats.
Quel est le profil des censeurs au sein des conseils d’administration ?
Le censeur est choisi librement par chaque entreprise selon les critères qu’elle aura elle-même définis. L’AMF préconise que les sociétés déterminent en amont les caractéristiques de choix à observer.
Un censeur peut être recruté au sein de l’entreprise ou en externe. Il est possible qu’il soit membre du conseil d’administration, de surveillance ou d’un comité spécialisé. Il peut, par ailleurs, être nommé en raison des liens familiaux dont il dispose avec l’actionnaire majoritaire de l’entreprise ou encore pour représenter le maillage géographique du groupe, selon le rapport 2019 de l’AMF.
Selon les enjeux que souhaitent relever l’entreprise, les censeurs sont des experts reconnus en finance, en comptabilité, sur les sujets juridiques ou en matière de stratégie, le plus couramment. Nombreuses sont les sociétés qui analysent de près les connaissances complémentaires et les compétences additionnelles qu’ils vont apporter au conseil. Ainsi, il est également utile qu’ils soient familier avec le cœur de métier de l’entreprise. Ils sont reconnus pour leur indépendance. Pour en attester, ils ne doivent pas avoir de mandat dans les organes de la société.
Enfin, certaines sociétés souhaitent nommer des censeurs afin de disposer d’un vivier de candidats à un poste d’administrateur. Cela représente ainsi une étape préalable à un mandat d’administrateur. Dans certaines entreprises, toujours selon le rapport annuel de l’AMF, le censeur est un ancien administrateur écarté dans le but de répondre aux exigences du Code Afep-Medef en matière d’indépendance ou de la loi Copé-Zimmermann en matière de féminisation des conseils.
Les censeurs au sein des sociétés françaises
L’étude réalisée par l’AMF lui a permis d’observer la présence des censeurs au sein des conseils d’administration de 40 sociétés françaises au 31 décembre 2018. Elle s’est attachée à définir un panel intégrant les 20 plus importantes capitalisations du CAC 40 et les 20 plus petites du SBF 120 d’Euronext Paris. Elle a cependant exclu les entreprises étrangères et ne se référant pas au Code Afep-Medef.
Dans son rapport annuel, l’AMF dénombre 11 entreprises disposant d’un ou plusieurs censeurs. Au total, 15 censeurs sont comptabilisés au sein des conseils. En règle générale, le censeur est nommé en conseil d’administration (pour 7 des 11 entreprises de l’échantillon) et entériné par l’assemblée générale (pour 4 d’entre elles).
Forte de ses constats sur les censeurs et considérant l’expansion de ces postes au sein des entreprises et l’ambiguïté de leur rôle, l’AMF souhaite que l’AFEP et le MEDEF puissent s’emparer de cette question afin d’intégrer des préconisations dans leur code de gouvernance. Cela permettrait d’homogénéiser le fonctionnement de cette fonction au sein des entreprises en lui appliquant des règles communes. Le censeur pourrait alors être concerné par les règles aujourd’hui appliquées aux administrateurs ou bien aux conseils externes.
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